LE FESTIVAL DU LIVRE NICE

Edition 2022

HUIT ROMANS EN LICE POUR LE PRIX NICE BAIE DES ANGES 2022

Mar 14, 2022 11 min

HUIT ROMANS EN LICE POUR LE PRIX NICE BAIE DES ANGES 2022

Temps de lecture : 11 minutes

Huit romans ont été sélectionnés par les membres du jury du prix Nice Baie des Anges réunit à la Bibliothèque Romain Gary, ce lundi 14 mars, pour le rendez-vous annuel du prix littéraire de la Ville de Nice dédié au roman. Parrainé et doté par la ville de Nice ce prix récompense un roman paru dans les douze mois précédant le Festival du Livre de Nice.
Le prix Nice Baie des Anges sera attribué au lauréat (ou lauréate) 2022 le 13 mai, puis remis le vendredi 3 juin par Christian Estrosi, Maire de Nice, lors d’une cérémonie officielle en ouverture de la 26e édition du Festival du Livre qui se tiendra du 3 au 5 juin.

La sélection :

L’ours et le philosophe, Frédéric VITOUX, de l’Académie française (Grasset)
Parle tout bas, Elsa FOTTORINO, (Mercure de France)
Le gosse, Véronique OLMI (Albin Michel)
La décision, Karine TUIL (Gallimard)
Galerie des glaces, Eric GARANDEAU (Albin Michel)
Numéro deux, David FOENKINOS (Gallimard)
Monty, Dominique DUMOND (Le Passeur)
Au titre des souffrances endurées, Thierry VIMAL (Le Cherche Midi)

Le jury : Présidé par Franz-Olivier Giesbert, le jury réunit les écrivains, Paule Constant, de l’académie Goncourt, Irène Frain, Aurélie de Gubernatis, Didier van Cauwelaert, Laurent Seksik, Jean-Lug Gagliolo, Adjoint au maire de Nice et Nicolas Galup. Un jury de dix lecteurs, amoureux des livres et des mots, est également associé aux délibérations. Le lauréat sera annoncé le vendredi 13 mai.

Le Prix Nice Baie des Anges sera décerné le vendredi 3 juin par Christian Estrosi, en ouverture de la 26e édition du Festival du Livre de Nice (3, 4 & 5 juin 2022).

Depuis sa création en 1996, ce prix littéraire a couronné les romanciers : Patrick Renaudot, Raoul Mille, Franz-Olivier Giesbert, Gérard de Cortanze, Claude Imbert, Jean-Noël Pancrazi, Paula Jacques, Vénus Khoury-Ghata, Richard Millet, Eric Fottorino, Jean-Paul Enthoven, Didier van Cauwelaert, Saphia Azzeddine et René Frégni, Daniel Cordier, Laurent Seksik, Aurélie Hustin de Gubernatis, Romain Slocombe, Valérie Tong Cuong, Sylvain Tesson, Jérôme Garcin, Akli Tadjer, Barbara Israël, Jean Siccardi, Daniel Picouly et Jean-Luc Barré.

LES HUIT LIVRES « COUP DE CŒUR » DES MEMBRES DU JURY

Franz-Olivier Giesbert, président du jury a sélectionné L’ours et le philosophe, de Frédéric VITOUX, de l’Académie française (Grasset)

L’Ours et la philosophe est un roman où tout est vrai. Dans ce livre qui se lit comme un page turner, Frédéric Vitoux grand spécialiste de Céline, et des chats – sur lesquels il a écrit de nombreux ouvrages – nous raconte la grande querelle sur la « postérité » entre deux génies du XVIIIème siècle : le philosophe Diderot et le sculpteur Falconet. Une partie de l’ouvrage se déroule sur l’île Saint-Louis, ce qui donne l’occasion à l’auteur de nous emmener dans de joyeuses digressions avant de reprendre son fil. Succulent.

Franz-Olivier GIESBERT

L’ours, c’est le sculpteur Etienne Maurice Falconet, auteur de la statue équestre de Pierre Le Grand à Saint-Pétersbourg.
Le philosophe, c’est Diderot qui intervint avec empressement auprès de Catherine II pour que son ami bénéficiât de cette commande qui allait assurer sa célébrité dans toute l’Europe.
A travers leur amitié, leur correspondance et leur longue querelle épistolaire autour de la notion de postérité, Frédéric Vitoux restitue ici une époque et des hommes essentiels de l’histoire des idées (L’Encyclopédie et ses artisans, Diderot, d’Alembert, Rousseau, Voltaire, ou le trop méconnu chevalier de Jaucourt). A la faveur de rapprochements et de digressions (cet art dans lequel excella Diderot qui se comparait lui-même à un chien de chasse mal dressé), ce sont des moments de sa propre vie qu’il mêle à la matière de son essai, ce qui lui permet de s’exprimer mezza voce sur le débat qui, en son temps, nourrit l’amitié des deux hommes et aboutit à leur rupture.

Ecrivain et critique littéraire, membre de l’Académie française, Frédéric Vitoux est l’auteur d’une œuvre importante et protéiforme, forte d’une quarantaine d’ouvrages, où l’on compte romans, biographies, essais, qui lui a valu notamment le Prix Goncourt de la biographie (pour sa Vie de Céline ), le prix Valéry-Larbaud pour Sérénissime, le grand prix du roman de la ville de Paris pour Charles et Camille, le Grand prix du roman de l’Académie française pour La comédie de Terracina.

Paule Constant, de l’académie Goncourt, a sélectionné Parle tout bas, de Elsa FOTTORINO, (Mercure de France)

Je ne pouvais plus échapper à mon histoire, sa vérité que j’avais trop longtemps différée. J’avais attendu non pas le bon moment, mais que ce ne soit plus le moment. Peine perdue. La mienne était toujours là, silencieuse, sans aucune douleur, elle exigeait d’être dite. J’ai espéré un déclenchement involontaire qui viendrait de cette peur surmontée d’elle-même. La peur n’est pas partie mais les mots sont revenus.

En 2005, la narratrice a dix-neuf ans quand elle est victime d’un viol dans une forêt. Plainte, enquête, dépositions, interrogatoires : faute d’indices probants et de piste tangible, l’affaire est classée sans suite. Douze ans après les faits, à la faveur d’autres enquêtes, un suspect est identifié : cette fois, il y aura bien un procès.
Depuis, la narratrice a continué à vivre et à aimer : elle est mère d’une petite fille et attend un deuxième enfant.
Aujourd’hui, en se penchant sur son passé, elle comprend qu’elle tient enfin la possibilité de dépasser cette histoire et d’être en paix avec elle-même.
Elsa Fottorino livre ici un roman sobre et bouleversant, intime et universel, qui dit sans fard le quotidien des victimes et la complexité de leurs sentiments.

Elsa Fottorino est née en 1985. Journaliste spécialisée en musique classique, elle est rédactrice en chef du magazine Pianiste.

Irène Frain a sélectionné Le gosse, de Véronique OLMI (Albin Michel)

« Le gosse »: rien qu’au titre, le sujet s’annonce et l’atmosphère aussi: l’enfance désarmée, le sentiment d’abandon, la cruauté des adultes. La lumière enfin au bout du tunnel, les retrouvailles avec la joie. Et la douleur, paradoxalement, qui structure, construit pour la vie. La résilience, en somme. Le mot n’existait pas à l’époque où Véronique Olmi situe cette fiction poignante, les lendemains de la Première Guerre Mondiale où le  » social » , comme on dit  de nos jours,  n’avait de généreux que l’apparence. Une mère qui meurt et tout bascule. L’amour s’enfuit, plus personne ne vous attend, nul ne rêve plus pour vous.  Le jeune Joseph, sept ans, stigmatisé du sinistre qualificatif d’orphelin rejoint l’univers quasi-carcéral de l’Assistance publique. Dans ses pensionnats-casernes, éduquer, c’est dresser, avilir, surveiller et punir. Véronique Olmi explore sans concessions ces temps où l’on parlait encore de l ‘ » enfance malheureuse » . Une époque lointaine et cependant très proche qu’elle ressuscite avec maestria grâce à une écriture d’une rare empathie

Irène FRAIN

Joseph a sept ans. Il est né après la Première Guerre mondiale dans les apprendre et découvrir sont les moteurs de toute sa vie. Mais son monde bascule le jour où sa mère disparaît et où il devient pupille de l’État, un État qui a mis en place tout un système de « protection » des enfants pauvres, dont les bonnes intentions n’ont d’égal que la cruauté. De la prison pour enfants à la colonie pénitentiaire, la force de Joseph, les coups de dé du hasard, et la découverte de la musique lui permettront de traverser le pire. Dans une France portée par l’espoir du Front Populaire, peut-être retrouvera-t-il sa vie et sa joie. L’écriture intense de Véronique Olmi épouse le regard de ce gamin tendre et courageux confronté à la violence du monde adulte. Jamais, depuis Bakhita, la romancière n’avait trouvé une voix aussi puissante et juste pour raconter la renaissance d’un être à la vie. Un roman déchirant et révolté, un des plus beaux textes sur l’enfance à l’aube du siècle dernier.

Véronique Olmi compte parmi les plus grandes romancières contemporaines. Elle est notamment l’autrice de Bord de mer (Prix Alain Fournier 2002), Nous étions faits pour être heureux, Le Premier amour, Cet été-là (Prix des Maisons de la Presse, 2011), La nuit en vérité. En 2017, Bakhita a connu un écho retentissant en France comme à l’étranger (Prix du roman Fnac 2017, finaliste du prix Femina, du prix Goncourt et du Goncourt des lycéens, choix Goncourt de l’Orient et de la Serbie, Goncourt de la Slovénie…). Lui succède en 2020 Les Évasions particulières, chronique familiale de l’après Mai 68 à l’année 1981. Le Gosse est son quatorzième roman.

Aurélie de Gubernatis a sélectionné Galerie des glaces, de Eric Garandeau (Albin Michel)

Galerie des Glaces est un polar, un roman historique, un thriller géopolitique, une quête identitaire. Il y a des espions, des stratèges, des secrets industriels, des guerres souterraines, des manipulations, du poison, du sexe, de la passion. Pour résoudre le meurtre étrange du patron de La Manufacture (qui désigne Saint Gobain), un vieux détective et sa jeune stagiaire devront passer par la nouvelle Venise – Lagos, au Nigéria, capitale du commerce posée sur l’eau – pour basculer dans la vieille Venise de pierre, remonter aux origines de la fabrication du cristal et du miroir, tachées du sang des Vénitiens corrompus par Colbert pour livrer leurs secrets. Tandis qu’ils se confrontent aux réalités du capitalisme sauvage, le lecteur suit en parallèle les aventures d’un jeune miroitier qui découvre l’amour, la Cour de Louis XIV, le chantier de Versailles et les rigueurs de la raison d’Etat. Galerie des Glaces est un roman vertigineux, qui fait voyager sur un fil de cristal à travers les continents et les âges, pour mieux interroger notre modernité fragile et notre rapport complexe à l’Histoire.

Aurélie de GUBERNATIS

Alexandre Obkowicz, PDG du plus beau fleuron de l’industrie française, meurt aux commandes de son avion. Le détective Gabriel Thaumas est chargé d’une contre-investigation. En voulait-on à son groupe, engagé dans des projets Secret Défense ? Et pourquoi tous les voyages d’Obkowicz au Nigeria ? Pour les besoins de l’enquête, le détective Thaumas se rend en Afrique et consulte le marabout de Lagos : une sorcière blanche venue d’un passé lointain tirerait les ficelles de cette sombre histoire. Les origines du crime, en effet, remontent au XVIIe siècle, à la cour de Louis XIV. Dans le plus grand secret, Colbert a exfiltré de Murano la famille de Gianni, fils de maîtres-verriers, afin de connaître les secrets de fabrication des miroirs, farouchement gardés par la Sérénissime. Ces miroirs feront la splendeur de la galerie des Glaces à Versailles, mais Venise va-t-elle laisser faire ? Quand les drames du passé refont surface, le détective Thaumas comprend qu’Alexandre Obkowicz pourrait bien être la victime d’une malédiction venue des profondeurs de l’Histoire.

Eric Garandeau a été conseiller culturel à l’Elysée, puis président du CNC. Il est désormais directeur des affaires publiques chez Tik Tok France.

Didier van Cauwelaert a sélectionné Monty, de Dominique DUMOND (Le Passeur)

Comment la vie d’un homme en train de perdre la vue s’éclaircit brusquement quand, après des années sur une liste d’attente, il reçoit enfin le chien d’aveugle qui va lui redonner l’autonomie, l’élan vital et l’amour des autres. A partir de son expérience personnelle, Dominique Dumond, directeur et producteur de théâtre, nous offre un roman délicieux et poignant où la lucidité débouche, pour une fois, sur un optimisme qui soulève des montagnes. Une cure d’espoir, d’humour mordant et de tendresse qui nous fait épouser le point de vue de non-voyants irrésistibles, mais aussi le regard porté par les chiens guide sur ces drôles de bipèdes.

Didier van CAUWELAERT

Hervé perd la vue mais pas le moral, bien au contraire. Très en verve, car quand on est malvoyant « l’humour noir, ça s’impose », il nous dévoile page à page le secret de sa vitalité : Monty, son chien guide qui à chaque instant lui ouvre la voie de l’invisible. Grâce à lui, il peut tout réapprendre, vivre autrement, redécouvrir avec enthousiasme ce qui fait le sel de la vie. Au fil du temps, il communique avec Monty, lit dans ses pensées et parvient à se faire comprendre de son chien sans même lui parler. Comment est-il possible d’arriver à un tel point d’intimité fusionnelle ? Dans ce récit léger et attachant, drôle et touchant, tout à la gloire des chiens guides qui redonnent la vie aux malvoyants, Hervé ne s’apitoie jamais sur son sort. Avec tendresse et fantaisie, émotion et authenticité, il nous invite à refaire avec lui ce beau chemin de vie… et d’amour.

Tour à tour agent, manager, directeur artistique, producteur de one-man-shows et de spectacles musicaux, Dominique Dumond a dès l’origine participé au succès du Quatuor, une référence en matière d’humour musical, avant de prendre les commandes du théâtre des Bouffes Parisiens jusqu’en 2016. Déficient visuel dès l’âge de 21 ans, l’arrivée dans sa vie de Monty – millième chien attribué par l’école des chiens guides de Paris – a été pour lui une révélation une véritable renaissance et une formidable source d’inspiration.

Laurent Seksik a sélectionné La décision, de Karine TUIL (Gallimard)

Karine Tuil interroge les valeurs de la société, en s’emparant des thèmes qui font l’actualité. En 2019, elle avait exploré les ambiguïtés du mouvement #metoo dans Les Choses humaines (Gallimard, 2019), récompensé par les prix Interallié et Goncourt des lycéens ; plus tôt, dans L’Insouciance (Gallimard, 2016), elle auscultait la question des communautarismes et de la violence sociale. Pour La Décision, son douzième roman, elle embrasse une nouvelle fois un sujet brûlant et parvient à composer une tragédie contemporaine passionnante.

Laurent SEKSIK

Mai 2016. Dans une aile ultrasécurisée du Palais de justice, la juge Alma Revel doit se prononcer sur le sort d’un jeune homme suspecté d’avoir rejoint l’État islamique en Syrie. À ce dilemme professionnel s’en ajoute un autre, plus intime : mariée depuis plus de vingt ans à un écrivain à succès sur le déclin, Alma entretient une liaison avec l’avocat qui représente le mis en examen. Entre raison et déraison, ses choix risquent de bouleverser sa vie et celle du pays… Avec ce nouveau roman, Karine Tuil nous entraîne dans le quotidien de juges d’instruction antiterroristes, au cœur de l’âme humaine, dont les replis les plus sombres n’empêchent ni l’espoir ni la beauté.

Karine Tuil est l’auteure d’une dizaine de romans. Paru en 2019, Les choses humaines (Gallimard) a été couronné par les prix Interallié et Goncourt des lycéens.

Jean-Luc Gagliolo a sélectionné Numéro deux, de David FOENKINOS (Gallimard)

Comment surmonter l’amertume d’un échec ? Comment faire le deuil d’une trajectoire tant espérée ? Comment réapprendre à vivre lorsqu’un autre a été choisi ? 
David Foenkinos nous propose cette rencontre avec Martin Hill, qui porte le fardeau d’avoir été écarté au dernier moment du casting de Harry Potter. 
Au delà de l’idée initiale (excellente !), une réflexion de fond qui nous concerne tous.

Jean-Luc GAGLIOLO

En 1999 débutait le casting pour trouver le jeune garçon qui interpréterait Harry Potter et qui, par là-même, deviendrait mondialement célèbre. Des centaines d’acteurs furent auditionnés. Finalement, il n’en resta plus que deux. Ce roman raconte l’histoire de celui qui n’a pas été choisi.

David Foenkinos est l’auteur de nombreux romans dont La délicatesse, Les souvenirs ou Le mystère Henri Pick, tous trois adaptés au cinéma. Ses livres sont traduits en plus de quarante langues. Son roman Charlotte a obtenu le prix Renaudot et le prix Goncourt des lycéens en 2014.

Nicolas Galup a sélectionné Au titre des souffrances endurées, de Thierry VIMAL (Le Cherche Midi)

À 14 ans, Emilio a survécu à une attaque terroriste et vu son père mourir sous les balles. Déscolarisé, addict aux jeux vidéo, il grandit auprès de sa mère, Serena, embourbée dans les interminables parcours médicaux, juridiques et indemnitaires liés à leur statut de victimes. Malgré sa combativité, elle s’enfonce dans l’obsession, le désespoir et la bière. La rancœur et les loyers impayés s’accumulent. Emilio devient un jeune homme désabusé : les prétendues aides aux victimes masquent un système qui les exclut de la société humaine. C’est inacceptable : à 19 ans, il veut agir. Du fond de ses abîmes, Serena peut-elle voir celles qui menacent son fils – la haine, les théories du complot, la radicalisation… la violence ? À travers le portrait sensible d’une mère et d’un fils qui ne partagent plus que la douleur, la colère et l’amour, ce roman interroge les failles de l’engagement de la société envers toutes les victimes et dessine les limites de sa compassion.

Avec quatre récits autobiographiques salués par la critique (Olivier, Cherche Midi), Thierry Vimal s’est imposé comme un écrivain du vécu, usant du sien pour interpeler sur des sujets sociétaux actuels et universels. Cette fois-ci, c’est dans une fiction qu’il transpose son expérience personnelle pour dénoncer la violence faite aux victimes : une peine supplémentaire infligée par une société qui manque à ses responsabilités.